vendredi 10 novembre 2017

Histoire des Moteurs BURLAT

Histoire des Moteurs BURLAT

Joseph, Joannès, Eugène et Antoine BURLAT, (1881-1957, le leader de la fratrie)


Les quatre frères BURLAT sont nés à Rochetaillée (Loire), de Joanny et Marie JAY. Au recensement de 1881, on apprend qu’ils disposaient de plusieurs domestiques et voituriers. Leur père était meunier ; il fabriquait et vendait ses farines, et il fut élu Maire de Rochetaillée en 1882. Ses affaires marchèrent si bien que la famille quitta ensuite Rochetaillée pour s’installer à Montverdun où Joanny avait acheté des terres. Il fut également membre de la Société d’Agriculture, Industrie, Sciences, Arts et Belles Lettres du département de la Loire, avec son cousin Jean Louis, qui était fabricant de pointes à l’Etrat. Son père, Jean-Pierre Burlat, avait quitté St.Genis-Terrenoire, le berceau de la famille, avec trois de ses frères pour fonder à Rochetaillée, au lieu-dit des Quatre Aigues, une fabrique de pointes & épingles. On voit encore de nos jours, au bord du Janon, la grande cheminée de briques qui servait au fourneau de fabrication de la forge. Par la suite, l’idée de monter un moulin renforça les activités des frères Burlat, et c’est dans ce contexte que Joanny envoya ses quatre fils Joseph, Joannès, Eugène et Antoine (le cadet, mais aussi le leader) faire leurs études techniques à Lyon. Joanny meurt en 1894, et la famille va alors déménager, d’abord à Pont-de-Cheruy, puis à Lyon, 22 rue Ste. Pauline.

Ils installèrent, en 1905 à Villeurbanne près de Lyon, rue Poizat, un atelier de constructions de moteurs « BURLAT Frères» ; l’ainé avait alors 33 ans, et Antoine le cadet n’en avait que 23.



Ils fabriquent d’abord des moteurs d’automobiles, vendus à NSU, BSA, Cleveland, Indian, Harley-Davidson ..., puis il s’intéressent à l’aviation, car à partir de 1910 le moteur aérien devient un véritable défi technique. Puissant et léger, voici les deux conditions contradictoires qui sont requises pour parvenir à réaliser un moteur fiable et endurant. Si les aéroplanes naissants peuvent se contenter d’un moteur fonctionnant quelques minutes, le temps d’une envolée, les dirigeables doivent tenir l’air des heures durant et sans la puissance de leur moteur, ils sont désemparés ; c’est pourquoi, sur la plupart d’entre eux, sont montés deux moteurs, généralement placés aux extrémités de la nacelle. L’ingénieur lyonnais Antoine Burlat présente donc un moteur aérien de 35-40 ch à huit cylindres en étoile (ou plus exactement en X) ayant une triple particularité : bi-rotatif, refroidi par air, à vilebrequin roulant dans le carter. Le fait que le moteur soit bi-rotatif constitue en soi une nouveauté. En effet, sur la plupart des rotatifs, le vilebrequin est fixe. Sur le moteur Burlat, le bloc moteur et le vilebrequin sont tous les deux rotatifs. Le fait qu’il soit refroidi par air, une technique encore assez peu employée à l’époque, indique un moteur léger : 85 kg. Un rapport poids/puissance de 2,4 qui n’est pas extraordinaire, mais ce qui fascine les observateurs, c’est son système de vilebrequin tournant. Le moteur Burlat était révolutionnaire pour l’époque : il se composait essentiellement de 8 cylindres à ailettes disposés en croix, dans lequel le vilebrequin, au lieu d’être fixe comme dans le moteur Gnôme, était tournant. Et d’ailleurs, pour la petite histoire, en 1912, la Société des Moteurs Gnôme assignera la Société des Moteurs Burlat pour contrefaçon ; mais la démarche des héritiers de Marc Seguin se heurtera au conclusions des experts nommés par la Cour d’Appel de Lyon.



En 1913, un biplan Dufaux, équipé d’un moteur Burlat, vole pour la première fois à Bron, piloté par l’aviateur bien connu François Durafour. Certain de leur réussite, les Burlat créent à Lyon, début 1910, une nouvelle société portant le nom de son invention, la « Société des Moteurs Rotatifs Burlat » ; ils émettent des bons d’emprunt.



Basé sur un brevet ancien puisque déposé le 9 avril 1904 (n° 23.079), le « rotatif » Burlat de 35-40 ch est présenté à Paris au Salon de l’aéronautique en septembre 1909. Il fait sensation. Mais personne dans la presse n’est capable d’expliquer son fonctionnement. Bi-rotatif ? L’ingénieur chargé de sa présentation parle du théorème de Lahire. Du coup, personne n’y comprend plus rien. Mais ceci n’explique pas la mévente de la mécanique.



Testé par l’armée à Chalais-Meudon en 1910, pour une utilisation dans un dirigeable, le 35-40 ch dont la cylindrée est de 6,8 litres développe en réalité 25 ch. Commercialisé fin 1910 pour la somme assez modique de 6.500 francs, le rotatif Burlat, malgré son mystère, est totalement dominé en performances par les produits de la Société des Moteurs Gnôme, l’Omega, qui développe 50 ch en 1910 pour un poids de 76 kg, et l’Omega2, un 14-cyl de 100 ch dont le rapport poids/puissance est proche de 1.



Les efforts des Burlat se reportent alors sur le 8-cyl de 65-70 ch (les techniciens du Génie à Chalais-Meudon ne mesurent qu’une puissance de 55 ch à froid) dont la cylindrée est portée à 10 litres, et sur le 16- cyl de 140 ch (qui développe 105 ch dans le meilleur des cas) dont la cylindrée est de 20 litres.
En tout état de cause, le moteur bi-rotatif BURLAT continue à fasciner (encore de nos jours), sans doute par suite du fait que personne ne comprend comment il fonctionne véritablement. Le 65-70 ch, rebaptisé plus justement 60 ch en 1912, est commercialisé 11.000 francs. Comme le 35-40 ch, ce moteur ne trouve aucun acquéreur. La Société des Moteurs Rotatifs Burlat doit cesser ses activités en avril 1914 après qu’elle ait déposé plusieurs brevets sur son moteur, n° 1400999 en France en date du 16 janvier 1913, n° 71501 en Suisse en date du 13 janvier 1914.



Puis c’est la guerre… Les quatres frères sont mobilisés en août 1914, mais ils ne monteront pas au front : Joseph, l’ainé , sera détaché à l’Usine Salmson de Villeurbanne, un constructeur de moteurs d’avion qui a connu le succès commercial dès 1908 en remportant ses premiers gros contrats. Joannès sera détaché à la Société de Roulements à Billes de Levallois-Perret, Eugène sera détaché à la maison Buffant-Rabatel de Lyon, puis chez Salmson, et enfin Antoine sera aussi détaché chez Salmson pour diriger les fabrications pour l’aviation.



Antoine BURLAT, qui invente – à titre personnel - divers projets, ne parvient pas à les commercialiser. Après l’armistice, la société BURLAT, qui était en sommeil, est alors définitivement dissoute en 1919, et il entre comme ingénieur au bureau d’études Berliet où il terminera sa carrière. Antoine, le dernier des quatre frères, est décédé en 1957. Joseph, Joannès, Eugène retrouvent également des postes dans la région lyonnaise avant de s’éteindre : Joseph à Lyon en 1945, Joannès à Villeurbanne en 1953 et Eugène à Givors en 1954.



Par ce papier, saluons, près d’un siècle plus tard, le dynamisme des petits ateliers mécaniques français passionnés par les innovations et le développement créatif, qui ont investi parfois des millions de francs, comme les Burlat, dans la réalisation de leurs inventions, sans retour sur investissement.













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