La
saga des ESTIENNE de Saint-Lattier.
"
Saint-Lattier,
en
mémoire de
Saint-Eleuthère,
du nom du 13° Pape de l’Église catholique, qui prit la défense
des martyres chrétiens persécutés à Lyon sous
Marc-Aurèle, en
l’an 177 : Saint
Pothin, l’évêque, Sainte Blandine et leurs 46 compagnons…"
Des
« ESTIENNE » vécurent donc à Saint-Lattier pendant près
de trois
siècles, venus de la Vallouise en 1658 par
le destin de
Messire Vincent ESTIENNE, nommé Curé de la paroisse, et qui était
accompagné de ses neveux Jean et Magdeleine. Le curé s’éteindra
en juin 1669. Magdeleine épousera Antoine CHOSSON, le fils d’un
avocat de
Saint-Marcellin qui était aussi Procureur d’Office à St. Lattier
et petit-fils de Charles CHOSSON, Chatelain de St. Lattier.
Mariage de Magdeleine Estienne & Antoine Chosson |
Cette
auguste famille, dont est issue Louise LOMBARD, habitait une maison
forte dite « Le Périer », pas très éloignée du port
du Périer, en allant sur la voie de Vachères et St. Hilaire. Cette
maison existe encore, devenue aujourd’hui la propriété de la
famille DOYON. Notre ancêtre Charles CHOSSON eut quelques démêlés
juridiques avec Mr. De la Porte, le Seigneur de l’Arthaudière qui
possédait les droits de péage sur
la circulation des marchandises sur l’Isère ; descente de
radeaux de bois vers le Rhône et Marseille, remontée de bateaux
chargés de sel, de blé et autres marchandises.
Le
premier né et baptisé « ESTIENNE » du couple Jean &
Louise LOMBARD sur St. Lattier, ce fut en 1673. Au cours des cinq
générations qui s’y sont succédées c’est une cinquantaine de
naissances sous ce patronyme enregistrées au registre de la commune,
et plus de 500 descendants répertoriés, sous des patronymes
multiples,
car la caractéristique du
mariage des demoiselles, c’est qu’elles prennent le nom de leur
mari.
Bien évidement, ce chiffre n’est qu’exhaustif et ne tient pas
compte des branches latérales sur lesquelles des recherches se
poursuivent quand
elle ne
se perdent dans des
migrations sur d’autres territoires.
Que
doit-on retenir de la première
génération
née au village ? D’abord des filles, sept pour trois garçons.
Ici, nous n’allons pas entrer dans l’examen détaillé de toutes
les filiations, mais nous arrêter à quelques unes…
Et
je voudrais mentionner le cas très exceptionnel de Françoise
ESTIENNE (1677-1714) qui épouse un UZEL. On retrouve dans sa lignée
un certain Joseph TIGNEL qui – en 1818, après son mariage –
descend s’installer à Marseille car il est tailleur au 5° Rgt. de
Ligne et réside au Fort St. Jean. Ce régiment est l’un des plus
ancien et illustre de
l’armée française,
créé sous l’ancien régime, qui prit part aux campagnes de
Napoléon et se rallia à lui lors
des
Cents Jours, avec
l’épisode fameux du Lac de Laffrey… On
arrive ensuite sur Amédée DELPHIN, fils et petit-fils de
distillateur, qui épousera en 1921 à Lyon Marie Louise ETIENNE, une
cousine germaine de notre père. Il s’agit d’un hasard rarissime
où deux époux (sans le savoir) ont les mêmes ancêtres à huit
générations d’écart. Ce n’est pas tout ; Amédée et
Marie Louise avait un garage d’automobiles à Vichy où ils
s’éteignirent le premier en 1971, la seconde en 1945. C’est à
croire que les liens entre la distillerie et l’automobile sont une
marque de fabrique !
Celui
de Jean ESTIENNE est
à mentionner,
lui
qui
épouse une RANCHON et va s’installer à St.Jean-en-Royans en 1716,
là où naissent leurs enfants. Sa dernière présence est signalée
à La Sône en 1739 pour le contrat de mariage de sa nièce
Marguerite UZEL. Et après, plus rien, aucune trace de sa famille, ni
du coté de St. Lattier, ni à St.Jean. Famine,
épidémie, froid glacial… comment expliquer cette soudaine
disparition ?
A
la seconde
génération,
c’est
donc la branche de Claude ESTIENNE (1685-1736) qui va être la plus
porteuse
d’avenir, malgré le fait qu’il s’éteint relativement jeune,
laissant sa femme Jeanne BONNARDEL avec huit enfants âgés alors
entre 1 et 12 ans ! Les enfants naissent au « Port de
Périer », dénommé parfois dans le registre « hameau de
Jean Estienne ». Claude va ajouter la culture des champs et
l’élevage à son travail de pontanier sur l’Isère. L’un
de ses fils, Pierre, onze ans, va d’ailleurs se noyer dans l’Isère
en août 1738. Un second, Alexandre, disparaître totalement de la
circulation après 1765 (il a trente cinq ans ) après avoir été
présent au mariage de deux de ses sœurs et parrain de plusieurs
nièces. Que de mystères sur ces absences ou disparitions !
Troisième
génération :
c’est donc un second Claude ESTIENNE (1726-1788) qui va assurer la
descendance agnatique. Il épouse une certaine Françoise THOMAS qui
mourra en 1739 à seulement trente huit ans suite aux difficultés
d’accouchement de son dernier fils, Jean-François. Peu avant de
s’éteindre, Claude mettra en forme son troisième testament,
répartissant ses biens entre ses six enfants survivants.
Quatrième
génération :
sur le plan agnatique, on va alors avoir un troisième Claude
ESTIENNE (1765-1817), l’aîné de la fratrie, qui conserve le Port
du Périer, Jean-André ESTIENNE
qui
va partir à St.Paul-lès-Romans pour y ouvrir un « cabaret »
(café-restaurant), et Joseph ESTIENNE
qui
va ouvrir une menuiserie aux Fauries,
un quartier sur la route menant à Romans, mais comme ce dernier
n’aura qu’une fille partie ensuite à Murinais avec son mari, la
saga sur St.Lattier ne se poursuit donc qu’avec Claude.
On
entre à
présent dans
la
période
révolutionnaire où l’état-civil va généraliser la disparition
du « S » de ESTIENNE. Claude va prospérer sur les terres
léguées par son père. En 1790, il a 24 ans lorsqu’il épouse
Marie MIETTON, et – assez – rapidement – il entreprend de faire
édifier, à quelques pas du Port du Périer, un vaste bâtisse
drômoise en pierres de rivière, une demeure que l’on peut encore
observer de nos jours puisque située en un quartier dénommé « La
Rivière », juste en dessous du pont de l’autoroute reliant
Valence à Grenoble. Elle a été transformée par le propriétaire
en plusieurs appartements, car démembrée lors de la succession de
Joseph ESTIENNE (1826-1913) qui fut le dernier ESTIENNE occupant de
cette maison.
La maison de La Rivière |
Dans
la famille, on racontait par transmission orale une histoire assez
extraordinaire… Lors du « Vol de l’Aigle » en
1815, le retour de Napoléon de l’île d’Elbe, l’Empereur -
après avoir rallié le 5° de Ligne à Laffrey - est arrivé à
Grenoble le 7 mars où il a passé deux jours à l’Hôtel des
Dauphins, où il signa ses premiers décrets impériaux ; le 9 mars,
il s’est arrêté à Rives, a pris un frugal repas à l’Hôtel
des Postes, pour arriver à Bourgoin tard dans la nuit, accompagné
de ses 7.000 hommes, fantassins & cavaliers. Les chevaux de
l’Empereur avaient besoin d’énormément de fourrage et d’avoine
pour les accompagner dans leur voyage de remontée vers Lyon, et
Claude ETIENNE aurait alors procuré des charrettes pleines des
denrées nécessaires à la petite armée. L’Empereur, pour le
dédommager, lui aurait fait don du Château de Ravello sur la côte
amalfitaine d’Italie. Du coté de chez nous, jamais nous n’avons
vu un tel papier, et il est probable que – si il existe – il sera
resté en
possession
du fils aîné de Claude : Jean ETIENNE (1791-1862), qui
deviendra Notaire et Maire de St. Lattier.
Le tambour André Estienne |
Cinquième
génération.
De
Claude & Marie MIETTON naîtront dix enfants, mais
seuls trois survivront et feront souche : Jean (déjà évoqué
ci-dessus),
Joseph (1799-1871) et Ferdinand (1810-1867). Jean et Joseph resteront
sur St.Lattier, tandis que Ferdinand, après son mariage, ira
s’installer à St.Jean-en-Royans.
1/-
Jean ETIENNE (1791-1862) épousera en 1813 Marie-Anne CHEVALIER de
laquelle il aura cinq enfants. Lorsqu’il est jeune, Jean est
« cultivateur aux Pierrets » ; mais vers 1819 il
reprend l’étude notariale de Jean Meynier, Notaire à La Rivière.
Ce dernier est un bon ami de Jean, au point qu’il est témoin à
son mariage et parrain de plusieurs de ses enfants. Puis, il sera élu
Maire de St. Lattier et assurera plusieurs mandats. Il acquiert une
grande demeure bourgeoise, pourvue de nombreuses pièces, avec grands
salons et escalier d’honneur, propriété dénommée « L’Olivier »,
qui est aujourd’hui une foyer
communal,
car la propriété familiale sera démembrée en 1891.
L'Olivier, ancienne propriété de Jean Estienne |
Parmi
ses enfants, seule la branche de Eugène ETIENNE (1827-1877) &
Gabrielle SAVOYE a constitué une descendance « ETIENNE »,
après
une migration
dans la région lyonnaise à partir de 1877. La branche de
Jean-Auguste
ETIENNE (1821-1892) se prolonge mais avec des filles. Celle de
Charles
Ferdinand ETIENNE (1825-1881), Notaire à Rives, s’éteint
– agnatiquement parlant - avec
la
mort
du Sous-lieutenant Maurice ETIENNE en 1917 puis
celle
de son père la Commandant Léon ETIENNE (1857-1927) ; elle
comporte aussi
des descendants, mais
par les filles. Un blog est consacré à leur sujet.
2/-
Joseph ETIENNE (1799-1871) épousera en 1825 Marie DURIF, de laquelle
il aura deux enfants, dont autre Joseph ETIENNE (1826-1913) qui sera
le dernier agriculteur de la famille à habiter St. Lattier. Sa
descendance est prospère du coté de la Savoie et de la région
drômoise où elle rejoint la famille LEYDIER, du groupe papetier de
St.Vallier. De
leur maison de La Rivière, il ont assisté à la construction de la
ligne de chemin de fer Valence-Grenoble entre 1850 et 1864, la voie
passant juste à coté de leur maison. Le bac sur l’Isère sera
remplacé par un pont construit en 1875 vers les Fauries, reliant
St.Lattier à Eymeux, et donc ouvrant sur le Royans et le Vercors.
La Rivière, de nos jours |
3-/
Ferdinand (1810-1867) épousera en 1835 Léoncie ABISSET, la fille
d’un Capitaine de Grenadiers de l’armée napoléonienne, et
s’installera comme banquier à St.Jean-en-Royans ; il
sera aussi « Négociant en soie ».
C’est l’époque de la création des premières agences bancaires,
rendues nécessaires par le développement du commerce et l’ère de
l’industrialisation. Les
Abisset sont très nombreux sur St.Jean et vivaient
du travail forestier, d’exploitation de bois ; après son
mariage, Ferdinand acheta
le clos de la famille Abisset, qui appartenait aux époux Charles
Raymond & Madeleine Terrot. Cette maison était sise dans la
« Grande Rue » du village. Il acheta aussi un « domaine
agricole composé de plusieurs maisons d’habitation, de champs et
terres labourables, de vignes et prairies » dont hériteront
Anne et Hippolyte.
Par
la suite, Anne
quittera
St.Jean pour travailler
à Lyon
où
elle rencontrera son premier mari ; Hippolyte – lui –
quittera St. Jean
pour Saint-Etienne où
il rencontre sa première épouse et ouvre
une confiserie. Mais
il
reviendra
à St.Jean durant
quelques
années, à la
suite
de son second mariage avec Haydée COUTION, la
fille
d’un traiteur de St.Jean. En 1903 il
liquide tous ses biens, après la mort d’Anna, et revient
s’installer définitivement dans
la Loire, d’abord
à
Chazelles,
puis à St.
Etienne, avec
l’objectif
d’y
monter une
distillerie.
De
ses deux mariages, il
aura une descendance, dont
les
quatre
frères
ETIENNE qui créèrent la « Grande
Distillerie de Saint-Etienne ».
Nous
voici au terme de près de trois siècles et sept générations de
présence des
« ETIENNE »
dans ce village de l’Isère. Nous
sommes le14 mars 1913, Joseph ETIENNE vient de s’éteindre à l’âge
de 86 ans dans sa maison de La Rivière… Deux
de ses filles ont quitté le village, l’une
a épousé un COTTIN, Instituteur à St.Hilaire, qui va
faire
souche à Miribel-les-Echelles en Savoie, une autre a épousé un
HENRY, Directeur d’une scierie à St.Hilaire-du-Rosier, qui y a
fait souche aussi.
Ne
restent
à St. Lattier que deux « demoiselles ETIENNE » qui
s’éteindront respectivement en 1939 et en 1944.
[la
saga des ESTIENNE continue,
avec
l’histoire des ETIENNE des branches contemporaines, Lyon, St.
Etienne, Drôme]